Au regard des informations recueillies quel enseignements tirés de ce travail ? La gouvernance forestière en République Démocratique du Congo est en marche depuis l'avènement du code forestier en 2002 grâce à la volonté politique du gouvernement congolais. Mais en dépit de la production des textes réglementaires y afférent, des obstacles persistent dans l'application desdits instruments.
Le secteur forestier congolais est en proie à plusieurs facteurs endogènes et exogènes qui freinent la matérialisation de la gouvernance malgré de l'existence des lois et textes réglementaires en la matière. A la lecture de ces facteurs, on peut citer les plus importants et gênants à savoir : le manque de cadres compétents. l'interprétation erronée des textes règlementaires et légaux ; les mauvaises conditions de travail ; l'insuffisance des moyens logistiques et financiers ; l'insuffisance des capacités dans l'analyse des questions environnementales ; les concessions forestières non aménagées ; les statistiques de production non contrôlées et maitrisées ; le manque de développement organisationnel de la société civile environnementale ; la faible synergie des organisations de la société civile environnementale pour assurer le plaidoyer ; la vision différente sur la gouvernance forestière ; l'ignorance des potentielles ressources par les parties prenantes ; la décentralisation institutionnelle faible et inappliquée ; le mécanisme peu clarifié et méconnu de rétrocession des recettes aux entités territoriales décentralisées consécutives à l'insuffisance des moyens de contrôle ; le manque d'informations et de bases de données fiables et objectives sur l'exploitation forestière.
Le secteur forestier est aujourd'hui à la croisée des chemins, avec la récente signature de contrats de concessions marquant la fin du processus de conversion des anciens titres forestiers. Le processus de révision et conversion de 80 des 156 anciens titres en nouvelles concessions a attiré certains critiques - par exemple sur la légalité des certaines titres, et le manque d'implication des peuples autochtones dans le processus. Néanmoins, le processus peut certainement améliorer la transparence dans le secteur forestier si tous les résultats, y compris les nouveaux contrats, sont publiés. De plus, ces nouveaux contrats doivent inclure les clauses sociales négociées avec les communautés locales et autochtones, permettant à ces dernières de bénéficier directement de l'exploitation de leurs forêts. Il reste à voir si les structures et agréments mises en place par ce processus vont augmenter l'implication de communautés riveraines dans la prise de décisions, et apporter de réels bénéfices en termes de développement et de préservation de l'environnement.
En parallèle, le gouvernement a adopté un moratoire sur l'octroi de nouvelles concessions forestières dès 2002, officialisé en 2005. Les 80 titres en cours de conversions sont donc les seules concessions d'exploitation forestière industrielle existant en République Démocratique du Congo à ce jour. Ils représentent 22,4 millions d'hectares, ou 8,4% de la superficie forestière nationale de 145 millions d'hectares. L'exploitation forestière reste possible via les permis artisanaux, délivrés selon un processus bien plus souple et théoriquement limités à 50 hectares et réservés au marché national. Néanmoins, en pratique, de nombreux concessionnaires forestiers abusent de ces permis artisanaux pour se livrer à une exploitation quasi-industrielle de la forêt, profitant du laxisme de l'administration forestière pour détourner ces permis de leur usage premier et atténuer les conséquences du moratoire sur la limitation de l'exploitation industrielle. Enfin, l'exploitation illégale du bois s'est elle aussi considérablement développée au cours des dernières années de l'avis général, même si elle reste par nature difficile à quantifier.